en défense de la République Catalane (Juan Carlos Moreno Cabrera, le 28/10/17)

Hier, le 27 octobre 2017, se sont produits deux événements d’une énorme importance politique. D’abord, la proclamation de la République Catalane. Puis le coup d’Etat du gouvernement contre la démocratie sous couvert de l’article 155 de la Constitution, apparemment une espèce de barre libre pour ennemis de la démocratie.

La proclamation de la République Catalane est le reflet institutionnel de la lutte du peuple catalan pour ses liberté et dignité nationales. Ce n’est pas une mesure imposée par une bande d’indépendantistes enragés, qui seraient devenus fous. L’élan est venu d’en bas, du peuple : il y avait là les autorités municipales catalanes, celles qui sont en contact direct avec le peuple, soutenant ou exigeant cette proclamation.

Le gouvernement de la Généralitat a paru douter jusqu’au dernier moment mais faisant preuve d’une attitude démocratique, il a écouté qui il devait écouter : le peuple catalan. La proclamation de la République Catalane est un événement à immense portée politique. Elle marque le commencement de la fin du post-franquisme, de la transition ratée, concrétisée dans la constitution de 78, carcan qui empêche le développement conséquent des libertés et de la démocratie. Pour détourner notre attention de cet événement décisif, de nombreuses personnes représentantes des partis de gauche parlent d’illégitimité supposée ou d’inconvenance de la séparation ou indépendance de la Catalogne du reste de l’Espagne, reprenant les paramètres du discours officiel post-franquiste et sans mettre en avant, dans l’absolu, l’importance, au coeur de la lutte, pour la démocratie, de cette proclamation.

Quelques-unes se disent tristes que la volonté majoritaire du peuple catalan l’ait emporté, dans cette décision. Ce qui est triste, très triste, c’est de voir des personnes représentantes de partis qui se disent démocrates se plaindre que le gouvernement écoute le peuple et agisse en conséquence.

La destitution, par l’actuel gouvernement espagnol, des représentants légitimes du peuple catalan, est une des attaques les plus terribles contre la démocratie qui se soient produites dans ces dernières décennies. Le gouvernement d’Espagne agit contre les décisions démocratiquement adoptées par le peuple catalan, en s’emparant d’un article de la Constitution qui ne sert en réalité qu’à mettre en évidence la réelle nature antidémocratique et excluante de l’actuelle Constitution, dans laquelle se reconnaît une seule nation souveraine, l’espagnole.

Le gouvernement espagnol a convoqué des élections sous prétexte de restaurer la légalité constitutionnelle en Catalogne. Et il le fait, avec des prisonniers politiques catalans, en menaçant de mettre le gouvernent en prison, et à la table du parlement catalan. Qui sait, avec peut-être aussi l’idée de rendre illégaux les partis indépendantistes ? C’est à dire, des élections « vraiment libres et démocratiques ». Supposons, si le résultat des élections catalanes de décembre ne satisfont pas le gouvernement, ou si ceux qui sont élus se comportent d’une façon « non acceptable » constitutionnellement, qu’on pourra toujours revenir à l’article 155 et convoquer d’autres élections – jusqu’à ce que les résultats satisfassent le gouvernement du PP.

Est-ce la démocratie que désirent ceux qui se félicitent de cette convocation électorale de décembre ?

Juan Carlos Moreno Cabrera / professeur de linguistique à l’Université autonome de Madrid.
Traduction : Marie Cosnay.

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