pourquoi j'aime les romans policiers

les mois sont tous venus, ils présentaient bien, ils se serraient dans des allées comme ça, ils étaient droits et fiers, les mois, faisaient voir leurs atours et leurs architectures, que faisiez-vous dans vos allées printanières interrogeait quelqu’un à qui je devais bien avouer que je n’en savais rien, ils ont tourné comme sur des roulettes, les mois, pour se montrer, droits dans leurs plus beaux vêtements, tous ensemble, les uns derrière les autres, et sages. Avec eux les mois avaient apporté de grands moments, des moments chaleureux quelles que soient les rigueurs, on prenait dans ces moments de mauvais cafés, fumait des cigarettes, buvait des eaux de vie sans souci pour ce qui se délabrait partout ou giclait d’humeurs sanglantes et comme dans un roman policier on a détaché d’un corps, au parang peut-être, une tête, de la cervelle a bondi sur un plastron, on a trouvé un cadavre au sang séché brunâtre, un mort très ancien, à l’un qui était planqué là on a fracassé le crâne au marteau, quelqu’un a laissé échapper un cri ténu et la fille qui était attachée dans la chambre voisine on l’a délivrée mais avec deux balles dans l’épaule et un nouveau coup de parang en défense et après un deuxième giclement de sang et de cervelle, une mare. Dans une pièce abominable aux volets entrebâillés, la cuisine, où la poussière est tenue par la crasse aux meubles vernis si bien qu’elle ne pourra jamais s’envoler dans un rayon de soleil comme chez Lucrèce qui voit dans ses rayons de petites peaux ravies de rencontrer d’autres petites peaux de fantaisie, on boit un café. Sur la table de formica ou de bois verni et dégueulasse on s’accoude, tout autour il y a le sang et la cervelle et derrière la porte le danger qui demeure mais on fait du nescafé et la fille délivrée au petit visage et aux cheveux très décoiffés boit le même nescafé que nous et dans la poche d’un des cadavres elle trouve une cigarette, une gauloise rouge et blonde, qu’elle nous tend, on boit le nescafé et on fume lentement et ça c’est un fameux bon moment, un de ceux qui sont venus avec les mois qui se présentent. Il y en a d’autres mais aucun n’est plus fameux que celui-ci, celui au parang, à la fille décoiffée et aux morts dont on se fout et qui restent les morts, quand on a envie de vomir et que le café sur un morceau de table en formica met tout, la morgue, les mois, les sales petits secrets, les institutions et le monde avec sa putain, l’Histoire, en attente